Pourquoi les gaz se dissolvent dans un liquide quand on augmente la pression ?

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Pourquoi les gaz se dissolvent dans un liquide quand on augmente la pression ?

Nous sommes stagiaires à l'IUFM de Rouen et nous devons constituer un dossier sur les gaz : pourquoi un plongeur doit-il respecter les paliers de décompression ?... Nous nous posons les questions suivantes : Pourquoi la composition des gaz du sang change-t-elle quand on plonge à très grande profondeur (utilisation d'un autre mélange gazeux que l'air comprimé dans les bouteilles quand on plonge à très grande profondeur)?

Pourquoi les gaz se dissolvent dans un liquide quand on augmente la pression ?

Mon 13/11/00 - 13:00

Quelques éléments de réponses par un non pratiquant de la plongée...
J'imagine que la dissolution d'un gaz dans un liquide est possible car, microscopiquement, les molécules ne forment pas un assemblage complètement compact, qu'il existe des cavités ou des espaces, évoluant avec le temps, dans lequel peuvent se loger des molécules de gaz. On imagine aussi que plus la pression (partielle) du gaz est importante, plus les espaces sont occupés et plus on peut dissoudre de gaz, du moins jusqu'à la limite où le liquide est saturé en gaz. La dissolution de gaz dans les tissus de l'organisme obéit certainement à des mécanismes plus complexes.
Ce qui change à grande profondeur, à cause de la pression, c'est la quantité de diazote dissous dans les tissus du système nerveux. Cet effet anesthésiant (ivresse des profondeurs) est l'un des effets dus à la pression. Il apparaît pour une profondeur d'environ 60 m, soit pour une pression de 7 fois la pression atmosphérique, c'est-à-dire une pression partielle de diazote d'environ 5,6 fois la pression atmosphérique (l'air étant composé à environ 80 % de diazote). Aussi, pour réduire les effets du diazote, on diminue sa concentration dans le mélange respiré (a priori de l'air) : on augmente la concentration en dioxygène ou on remplace le diazote par de l'hélium.

mer 15/11/2000 - 02:01
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eveleigh@agroparistech.fr

Partie 1
Les gaz sont solubles dans l'eau, c'est-à-dire que les molécules d'eau et les molécules de gaz s'attirent avec des forces plus ou moins intenses qui permettent à un certain nombre de molécules de gaz de "s'intégrer" au liquide.
Les forces dépendent des propriétés physico-chimiques des molécules de gaz et de liquide. La nature des atomes constituant ces molécules et leur enchaînement ont des conséquences sur les forces électrostatiques d'attirance. Par exemple, le dioxyde de carbone CO2 ("gaz carbonique") est très soluble dans l'eau (eau "gazeuse"), mais pas dans le white spirit. Le butane est très soluble dans le white spirit mais pas dans l'eau (expérience à ne pas tenter : danger !). Le diazote N2 (on dit encore souvent "l'azote") de l'air est un peu soluble dans l'eau.

Première loi : la solubilité dépend des propriétés du soluté et du solvant.
Entre les molécules de gaz et de liquide, il ne s'agit que d'attirance et pas de liaison solide, de sorte que la relation entre les molécules est diminuée lorsque les molécules sont très agitées, ce qui est le cas lorsque la température augmente.
Deuxième loi : la solubilité des gaz dans l'eau diminue lorsque la température augmente.
Elle est nulle lorsque l'agitation est telle que les molécules du liquide s'agitent tellement qu'elles ne restent même plus rapprochées les unes des autres, c'est-à-dire lorsqu'on arrive à la température d'ébullition.
Si on considère un liquide en contact avec un gaz, un équilibre s'établit pour les molécules de gaz : dans la phase gazeuse, elles se gênent, se choquent et elles ont donc une pression. Si on les confine dans un récipient, elles tapent sur les parois : d'autant plus fort qu'elles sont nombreuses par unité de volume et qu'elles sont agitées (que leur température est élevée) : c'est la pression.
Dans la phase liquide, elles sont attirées par les autres molécules, mais finissent aussi par se gêner.

Finalement, elles se répartissent entre les deux phases de manière à ce que la gêne globale soit minimale. Si la pression est forte dans la phase gazeuse, elles vont avoir tendance à passer vers le liquide, et inversement.

Troisième loi : la solubilité des gaz dépend de la pression du gaz en contact avec le solvant.

Quatrième loi : le passage du liquide au gaz ou du gaz au liquide prend du temps.
Partie 2
En complément à la réponse de Gérard Torchet qui a bien décrit les conséquences de la troisième loi sur la dissolution du diazote dans l'organisme des plongeurs.
La pression augmente sous le poids de l'eau lorsqu'on descend en plongée ; il faut respirer de l'air à la pression de l'endroit où on se trouve, sinon on n'arrive pas à remplir ses poumons. Plus on descend, plus l'air respiré est à pression élevée (par exemple trois bars quand on est sous 20 m d'eau).
Conséquence directe (troisième loi) : l'air se dissout dans le sang, puis dans tout l'organisme.

Conséquences induites :

1°) A grande profondeur, la quantité de diazote dissout est telle que ce gaz commence à manifester sa neurotoxicité (ivresse des profondeurs mentionnée par Gérard Trochet, à partir de 35 m chez les plongeurs peut expérimentés).

2°) Lorsqu'on remonte, la pression de l'air respiré, donc de la phase gazeuse en équilibre avec le "liquide" qu'est l'organisme, diminue. La pression diminue, donc la solubilité diminue (toujours la troisième loi !) et l'air a tendance à faire des petites bulles dans le sang ou même n'importe où dans l'organisme. En fait, ce n'est pas l'air qui produit des bulles, mais seulement le diazote de l'air : le dioxygène est consommé par les tissus ou pris en charge par l'hémoglobine. La bulle, c'est l'accident de décompression qui peut être fatal si elle est mal située (cœur, cerveau). Il faut donc remonter lentement, de manière à laisser du temps au diazote pour passer des tissus au sang, puis du sang au poumon où il peut être expiré : le processus n'est pas instantané (quatrième loi). On peut même être amené à marquer des pauses dans la remontée : ce sont les paliers. La durée et la profondeur d'un palier dépend de la quantité d'azote dissout, quantité qui dépend elle-même, d'après la troisième et la quatrième loi, de la profondeur et de la durée de la plongée.

Tout cela est très compliqué, d'autant plus que les tissus de l'organisme ne se comportent pas exactement comme des liquides. Les dispositifs qui prédisent les paliers : tables ou ordinateurs de plongée utilisent une description théorique plus sophistiquée et corrigée par des observations médicales. On se peut se référer aux cours de plongée, en particulier ceux correspondant à la préparation du "niveau 4" : livres ou nombreux sites WEB. Les accros trouveront des ouvrages médicaux spécialisés (mais réservés aux spécialistes !)

ven 08/12/2000 - 02:01
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