La naissance de l'univers, le Big-bang revisité

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La naissance de l'univers, le Big-bang revisité

Suite à une séance de classe avec des CM2, nous avons lu le livre du forum des sciences De l'atome à l'univers, qui expliquait que le Big-bang avait créé l'énergie.
Un élève a posé cette question : "Comment peut-il y avoir l'explosion du Big-bang s'il n'y a pas d'énergie ?" Je trouve sa question pertinente, mais je ne sais pas répondre. Il attend avec impatience une réponse sur ce sujet car il semble très motivé.

Mon 16/12/02 - 13:00

C'est une question extrêmement difficile qui mérite que l'on précise un peu certaines choses. D'abord rappelons comment est venue l'idée de Big-bang :

  • L'observation montre que toutes les galaxies s'éloignent de nous, ce que nous interprétons comme un mouvement d'expansion de l'univers. Faisant l'hypothèse que notre position n'est pas privilégiée (poursuivant en cela l'idée remise au goût du jour par Copernic, qui ôta la Terre du centre du système solaire) cette expansion est globale et chaque galaxie s'éloigne de toutes les autres. Il n'y a donc pas de centre d'expansion ; l'image de l'explosion est trompeuse.
  • Si l'univers est en expansion, il se dilue. Mais, en remontant le film à l'envers, il fut plus dense (donc plus chaud) dans le passé. En 1948 le physicien George Gamow calcula qu'alors l'univers devait être rempli d'un rayonnement de basse température. Ce rayonnement fut détecté en 1965 et sa température estimée à 3 degrés kelvins, à peu près - 270 °C (les mesures les plus récentes donnent environ 2,7 degrés kelvins). De là on peut montrer que la matière de l'univers est passée par une phase où sa température était de l'ordre de 3500 degrés kelvins.
  • Le problème de l'origine des éléments chimiques a permis de montrer que l'on peut encore remonter le film de l'univers pour atteindre des températures de l'ordre de 10 milliards de kelvins.

    La grande force du modèle de Big-bang est d'expliquer simultanément ces trois observations. Il est possible de pousser le modèle plus loin pour le faire "parler" sur ce qui se passait dans un passé plus reculé, au-delà de 10 milliards de degrés kelvins. La tentative n'est pas sans intérêt, mais elle peut devenir hasardeuse car la physique moderne n'est pas capable de décrire la matière quand la température dépasse, en gros, 10 à la puissance 32 degrés kelvins, très très chaud donc... En particulier il manque une théorie capable de décrire simultanément la gravitation (relativité d'Einstein) et la mécanique quantique (voir plus bas). Tous ces préliminaires pour dire que ce qui suit, appliqué à l'univers, est plutôt spéculatif et que le problème de l'origine de l'univers est encore largement ouvert.

    Maintenant revenons à la question : oui, certains physiciens prétendent que l'univers serait né d'une "fluctuation quantique du vide". Qu'est ce que cela peut bien signifier ?

    Commençons par le mot "quantique". La mécanique quantique est une théorie physique qui s'occupe du monde subatomique, et qui est caractérisée par l'incertitude. Au début du XXe siècle, elle mis à bas le déterminisme de la mécanique classique. L'une de ses conséquences stipule que l'énergie d'un système isolé n'est plus strictement conservée et peut fluctuer : le système peut "emprunter" de l'énergie à condition que cela se fasse pendant un temps suffisamment bref. En particulier, le vide peut fluctuer ! Le vide n'est donc pas tout-à-fait vide : de la matière et de l'énergie peuvent apparaître spontanément.

    D'après la théorie de la gravitation d'Einstein, toute matière et toute énergie déforme l'espace-temps. Les fluctuations d'énergie du vide peuvent donc modifier la structure spatio-temporelle de l'univers. Selon certains, une fluctuation du vide pourrait s'amplifier jusqu'à engendrer une vaste région - voire tout l'univers observable - de notre univers ! Comme rien n'indique qu'un tel événement soit unique on peut imaginer que naissent perpétuellement des morceaux d'univers plus ou moins semblables au notre. J'insiste, aucune théorie ne permet de développer avec confiance ces spéculations, aucune observation ne vient les valider.

    Finalement, la physique peut donner une description plus ou moins correcte d'instants de plus en plus éloignés dans le passé mais ne peut que rester muette sur la question de sa création. Du point de vue physique, on voudrait pouvoir évoquer une création comme un événement marquant une transition entre un avant et un après, ce qui nécessite - pour que le terme "avant" ait un sens - que temps, espace et lois physiques existent avant cette transition. On arrive ainsi au paradoxe que la création de l'univers présuppose l'existence de l'univers ! La cosmologie n'est donc pas une science facile...

  • lun 06/01/2003 - 02:01
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