Qu'y a-t-il entre les atomes ou les molécules ?

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Qu'y a-t-il entre les atomes ou les molécules ?

La liaison des molécules de glace n'est pas compacte, qu'y a-t-il dans ces espaces ?

Wed 30/04/03 - 14:00
francois.roby@univ-pau.fr

Pour être précis, je préfère reformuler la question en disant "l'empilement des molécules de glace" et non "la liaison", la notion de compacité pour une liaison me semblant impropre.
Je suppose que cette question est motivée par le fait que la glace flotte sur l'eau, ce qui prouve que l'empilement des molécules d'eau est moins compact dans l'état solide que dans l'état liquide; toutefois, on ne doit pas en déduire que les molécules d'eau liquide sont dans un état "parfaitement compact" et, surtout, il faut éviter de se représenter les molécules comme des briques d'un jeu de construction à notre échelle.
Certes, dans de la glace pure il n'y a rien d'autre que des molécules d'eau, et donc la réponse à la question posée pourrait être "il y a du vide", mais on pourrait aussi le dire pour quasiment tout empilement de molécules... On pourrait même dire que les atomes et molécules sont constitués essentiellement de vide, la taille du noyau étant ridiculement faible par rapport à celle du nuage d'électrons qui l'entoure. Bref, il ne faut surtout pas perdre de vue qu'à ces échelles, c'est la physique quantique qui règne, et que toute représentation "visuelle" de la matière est condamnée à être fausse. Contentons-nous de dire que les molécules d'eau sont "arrangées différemment" dans la glace et dans l'eau liquide, et que, dans le premier cas, elles sont un peu moins tassées...

lun 05/05/2003 - 03:01
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jean-claude.chottard@parisdescartes.fr

Je souhaite compléter la réponse sur quelques points :

  • Il n'y a pas de « molécules de glace ». La glace est de l'eau et nous parlons donc de molécules d'eau.
  • Comme dans tout liquide, les molécules d'eau présentent une attraction entre elles, sinon l'eau n'existerait pas à l'état liquide dans les conditions habituelles sur notre planète.
  • Cette attraction est relativement forte comparée à celle qui existe dans des liquides dont les molécules sont de masses voisines. C'est ce qui explique le point d'ébullition de l'eau (100 °C), très élevé par rapport à celui de l'ammoniac (-30 °C) qui est gazeux dans les conditions habituelles.
  • Cette attraction est en concurrence avec l'agitation des molécules due à la température (agitation thermique). Si l'on augmente suffisamment la température, on peut atteindre l'ébullition. Si l'on diminue suffisamment la température, les molécules bougent de moins en moins les unes par rapport aux autres et finissent par s'orienter de telle sorte qu'elles présentent le maximum d'interactions entre elles.
  • En schématisant, on peut dire qu'une molécule d'eau se comporte comme une sphère qui aurait «quatre têtes aimantées disposées au sommet d'un tétraèdre». Chaque tête peut donner une attraction avec un tête de «signe opposé» d'une molécule voisine. Si l'on permet aux molécules de s'orienter au mieux, par exemple dans le cas d'une congélation lente, chacune d'elles s'associera à quatre voisines, par ses quatre «têtes». Il se trouve que cet arrangement optimal des molécules, pour présenter le maximum d'interactions entre elles, correspond à une structure macroscopique «creuse». En effet, pour se lier dans les directions des sommets d'un tétraèdre, il faut laisser de petits espaces vides. C'est cette structure «creuse» qui explique que la glace soit moins dense que l'eau liquide et flotte sur elle. La densité de la glace est de 0,916 8 g/ml comparée à 0,999 8 g/ml pour l'eau à 0 °C. La densité de la glace ne représente que 57 % de celle de la structure dans laquelle les molécules d'eau se comporteraient comme des sphères, au contact les unes des autres et non comme des sphères «à quatre têtes» dont chacune est liée à une «tête» d'une molécule voisine.
  • Quand on augmente la température, l'édifice «creux» se tasse car les mouvements des molécules leur permettent d'occuper de plus en plus les petits espaces vides de la structure solide. La densité de l'eau croît ainsi jusqu'à 1,000 0 g/ml à 4 °C. Le compromis est alors en faveur du liquide au sein duquel les interactions sont toujours présentes, mais avec des durées de vie très courtes en raison des mouvements moléculaires. Ainsi, à 25 °C, la durée de vie d'une interaction entre deux «têtes» de deux molécules est de 1 cent millième de millionième de seconde... Cela ne veut pas dire qu'il n'y ait plus d'interactions entre les molécules, car en moyenne chacune d'elles a 4,5 à 5 voisines. La densité de l'eau à 100 °C est de 0,958 4 g/ml.
  • mar 13/05/2003 - 03:01
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    Je me demande si votre question ne porte pas sur la matérialité des liaisons... C'est en effet une question que l'on rencontre souvent, car on est facilement induit en erreur par la matérialité des tubes ou bâtonnets qui relient les boules représentant les atomes dans les "modèles moléculaires" (représentations ou "maquettes" agrandies des molécules).

    Sur cette base, je répondrais que, dans la glace, il existe deux types de liaisons : des liaisons fortes entre les atomes qui constituent les molécules d'eau (ces liaisons qui sont justement en général représentées par des bâtonnets ou des tubes), et des liaisons plus faibles, de nature similaire pourtant, entre les molécules d'eau, par l'intermédiaire des atomes qui les constituent, bien sûr (souvent représentées sur les schémas par des pointillés).
    Dans les deux cas, ces liaisons ne sont pas matérielles et ne peuvent donc être qualifiées de "compactes". Dans les deux cas, c'est du "vide" que l'on trouve entre les atomes et les molécules. Dans les deux cas, on devrait plutôt parler "d'interaction" entre les atomes concernés.

    Pour risquer une analogie ("risquer", car les analogies sont toujours dangereuses), c'est également une "interaction" qui empêche la Terre et la Lune de s'éloigner l'une de l'autre. Et lon ne représente pas pour autant par de la matière compacte cette attraction qui peut, elle aussi, s'exercer dans le vide.

    jeu 15/05/2003 - 03:01
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