Questions aux experts
Domaine Pédagogique
Corps et gestuelle dans les apprentissages
Dans les apprentissages, quel est le rôle du corps et de la gestuelle vis à vis du langage? Son importance?
Si elle est importante (la gestuelle) d'où vient l'efficacité de celle-ci?
Votre question est vague, aussi nous n'avons pas été trop de deux pour essayer de répondre à vos interrogations.
J'espère que vous trouverez des éléments de réponses.
Pour Darwin, c'est dans le geste que l'on retrouvait les restes de l'animalité de l'homme.
Il y a un langage du corps avec un code non verbal. L'enfant qui n'a pas accès au langage peut se faire comprendre. C'est l'adulte qui met les mots sur ce langage non verbal, la formulation et la reformulation sont essentiels pour que l'enfant accède au langage oral.
Le langage du corps dans chaque situation de communication n'est pas automatique, qu'il s'agisse de l'homme ou de l'animal. Le sujet dispose d'un ensemble de réponses possibles.
Cet ensemble de réponse est le résultat d'un apprentissage social, culturel et affectif.
Dinqwall propose de distinguer quatre sous-systèmes de communication :
- la communication affective innée
- l'apprentissage vocal (analogue chez certains oiseaux)- la communication gestuelle intentionnelle (qu'on observe chez les chimpanzés)
- la communication par le langage spécifiquement humain, ce qui modifie radicalement les relations fonctionnelles des autres niveaux
Tout cela est bien compliqué et je ne suis pas spécialiste.
Le geste n'est pas propre à l'humain mais il précède le langage « verbal ».
« L'ontogenèse du geste figuratif passerait alors par des niveaux au cours desquels l'enfant expérimente, anticipe peu à peu les conséquences de ses actions et acquiert graduellement la capacité d'élaborer une intention communicative. » Harding.
A la fin de la première année l'enfant découvre la valeur significative des émissions sonores et gestuelles. Il continue cet apprentissage en entrant à l'école maternelle.
Encore une fois c'est l'action qui permet l'éducation.
L'intérêt des sciences au cycle 1 est bien de développer ce geste malhabile dans ses actions motrices et de communication.
En accompagnant verbalement les actions de l'enfant, le maître lui permet d'accéder au langage, il crée un référentiel langagier commun pour permettre la communication.
C'est ce qu'on appelle « langage évocation ».
Mais on voit bien que sans manipuler, sans éprouver, il est impossible d'accéder au concept.
Penser aux enfants déficients visuels qui souffrent de verbalisme : ils ont les mots mais aucun concept derrière s'ils n'ont pas pu se créer d'images mentales.
Les enfants ont besoin de vivre et d'agir dans le monde pour s'approprier leur langage.
Caroline Verpillot.
1-En ce qui concerne la gestuelle de l'enseignant:
Rôle: accompagner le langage, et plus les enfants sont petits plus c'est
nécessaire. Pourquoi?
a- Aide à la compréhension
des consignes, par exemple, la gestuelle est simultanée au langage, elle
permet à l'enfant de se représenter mentalement la tâche à accomplir.
b- Aide à la mémorisation: elle a le même rôle que l'écrit en élémentaire,
on s'adresse ainsi à tous les enfants, qu'ils soient plutôt auditifs ou
plutôt visuels.
c- Aide à la construction du langage par la mémorisation de mots ou
d'actions, la mémoire fonctionnant en partie par associations, c'est
permettre à l'enfant de retrouver les mots par la représentation mentale
qu'il s'en est fait.
d- Aide à la structuration du temps, dans le domaine de la chronologie: ce
n'est pas un hasard si plus les enfants sont petits, plus on utilise des
comptines à gestes.
2-En ce qui concerne un langage du corps plus global de l'enseignant.
Rôle: rendre les enfants plus attentifs et leur permettre d'entrer dans la
communication par le corps.
a- La gestuelle peut traduire des sentiments, des émotions au même titre
que les intonations, il est donc indispensable d'être capable de la décoder
pour communiquer.
b- On sait à quel point il est difficile de garder une attention prolongée
des enfants dans les activités de langage, surtout quand elles sont
collectives (les niveaux étant tellement différents), le langage du corps
permet à un plus grand nombre d'enfants de comprendre ce que l'on raconte et
les rend, par conséquent, plus attentifs.
3- le rôle de la gestuelle chez l'enfant.
Rôle : vivre les situations pour les comprendre.
Structurer l'espace passe par la compréhension de la situation de son propre
corps dans l'espace, l'enfant doit vivre les situations avant d'accéder à
leurs représentations.
Cette nécessité est due au développement psychologique de l'enfant très
jeune, les petits distinguent peu le monde qui les entoure et leur propre
corps. Plus les situations seront variées, plus l'enfant prendra conscience de
son propre corps, de l'espace ou plutôt des espaces qui l'entourent et des
autres.
Lorsque l'enfant répète des comptines accompagnées de gestes, lorsqu'il
manipule (en sciences, par exemple), lorsqu'il appréhende l'espace dans des
situations variées en EP, il construit des représentations par mémorisation
des gestes effectués, de l'empreinte de son corps dans l'espace.
Il va donc élaborer des schèmes à partir des situations vécues qui vont lui
permettre de construire son langage.
Mais l'inverse est aussi vrai, toutes ces situations, si elles ne sont pas
accompagnées de langage, ne permettront pas à l'enfant de progresser.
Corinne Brisbart
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Produire une gestuelle pour faciliter la compréhension est une attitude ordinaire de communication qui me semble incontournable à l' école maternelle.
Au cycle 1 « la mise en mots » s' accompagne de gestes dans les relations quotidiennes. De la mimique au mime, la vie de la classe est ponctuée de moments marqués par la gestuelle pour faciliter les apprentissages, la communication. Des comptines, des chants, des albums, des contes, des consignes, des synthèses sont autant de démonstrations gestuelles. L' enseignant propose « un langage des signes » personnalisé avec lequel il est à laise et qui est traduit par ses paroles.
Je pense à une situation de classe vécue avec des élèves de Petite Section à partir de la comptine « Scions du bois, à la mère Nicolas, qui a cassé ses sabots, en mille morceaux. ». La comptine est mimée, expliquée, mémorisée, théâtralisée. Ce texte est utilisé comme sensibilisation pour le lancement d' une activité en sciences.
Il sagit d' un atelier bricolage où les outils sont adaptés à l'âge des élèves et où différentes matières comme du plastique mou, du métal, du carton, du cuir, du papier aluminium, de la pâte à modeler, du tissu, de la laine, de la ficelle, du scotch, de la colle sont à disposition. L' inventaire des outils s'élabore avec l'aide du mime afin d' indiquer la fonction : visser, enfoncer, limer, serrer, pincer, trouer, couper, scier, poncer...
La situation de départ est la suivante:
En expérimentant, trier les outils et les matières nécessaires pour refaire une paire de sabots ou d' autres souliers à la mère Nicolas et rendre compte du projet. La création trouve un champ libre, les problèmes de la résistance des matières, de l'assemblage et des mesures apparaissent assez rapidement. Cet atelier est une base pour une séquence fabrication et permet d' engager des séances de langage qui me semblent efficaces pour le développement des compétences dans plusieurs domaines.
J'espère que ce témoignage vous apportera des réponses.
Bon courage.
Claudine Schaub
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Dans les apprentissages scientifiques en cycle 1 les informations sensorielles constituent les matériaux de base. Il est nécessaire que l' enfant expérimente sur le monde des objets , des matières et du vivant avec tous ses sens pour en construire une représentation , une compréhension.
Je vois en fait dans la démarche d' apprentissage 2 temps de langage bien distincts :
- le 1er temps chez le très jeune enfant est le plus souvent non verbal . La gestuelle, les mimiques , les cris, participent à la découverte plaisir du milieu proposé. En maternelle les échanges entre pairs peuvent être de l' ordre de l' imitation (le plaisir d' être en phase), .
- le 2ème temps de langage (d'apprentissage) s'inscrit en rupture avec la phase de manipulation. Pour que l'échange soit possible l'enfant doit puiser dans son vécu (dans sa mémoire perceptivomotrice) les informations nécessaires à la construction d'une représentation . Ces informations une fois évoquées pourront être ensuite travaillées (trier ,hiérarchiser...).
Cette mise en mots n' est possible que si l' enfant dispose suffisamment de vocabulaire (imprégnation suffisante pendant la phase de manipulation par un accompagnement de l'adulte ) . Le geste peut aider l' enfant à mieux s' exprimer en participant à la signification ; il peut au contraire exprimer un malaise lié à la trop grande difficulté de la tâche.
On ne peut pas évoquer la communication verbale et non verbale sans faire référence à d' importants travaux relatifs à la petite enfance :
H. WALLON : « Le corps de l' enfant n' est d' abord connu et vécu par lui que comme corps en relation et non en tant que forme ou masse abstraites considérées en soi. La fonction tonique du corps est la fonction primitive et essentielle de communication, d' échange »
Henri MONTAGNER a mis en évidence l' existence , chez l' homme comme chez l' animal, de « rituels » de communication gestuelle, au cours d' une étude au jardin d' enfants.
B. AUCOUTURIER : « Le rythme et la tonalité du langage qui expriment les tensions affectives et émotionnelles vécues par la' utre dans son corps sont perçues bien avant son contenu proprement sémantique. »
L. LENTIN : « Entre 2 et 4 ans on constate combien les modalités de la communication varient à mesure que l' enfant grandit.
Chez l' enfant au- dessous de 3 ans le langage tient une place mineure dans sa propre activité de communication . Les procédés utilisés : gestes, mimiques, onomatopées, manipulations, activités motrices ou mouvements de toutes sortes. Au cours de cette période le peu de langage est chargé de sous entendus
Si l' enfant n' accompagne pas son « discours » du geste de désignation, il ne pourra pas établir de communication informative .
Sil est possible de communiquer sans parler , ou en parlant peu, il est inversement fréquent de parler sans communiquer..
Chez les touts petits les dialogues verbaux sont le plus souvent des dialogues de sourds, monologues superposés ou alternés.
Le langage utilisé par l' enfant au tout début de son apprentissage peut être qualifié de langage implicite. Les mots, mots- phrases , énoncés incomplets sont généralement émis « en situation », ils se trouvent en relation immédiate avec une réalité concrète directement perceptible à la fois par le locuteur et par l' interlocuteur »