Quelles différences entres les démarches?

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Quelles différences entres les démarches?

J' aimerais connaitre la définition ou plutôt la différence entre tous ces termes :
démarche scientifique
démarche technologique
démarche expérimentale
démarche d'investigation
Je pense avoir compris mais c'est surtout " la démarche d'investigation" dont il est si souvent question dans les IO qui me pose problème ! J' ai du mal à en saisir la signification et la spécificité par rapport aux autres !
Merci d'avance pour vos réponses.

Thu 24/06/04 - 14:00

Bon, je vais essayer de clarifier tout ça, en espérant y parvenir !

La démarche scientifique est une démarche qui conduit à construire une procédure de résolution d'un problème en utilisant, de manière explicite, les savoirs établis. Cette démarche débouche généralement sur l'extension du domaine de validité d'un savoir, voire, dans le cas extrème, à la construction de nouveaux savoirs après avoir fait le constat de l'absence d'opérationnalité des savoirs établis.
(Précision importante : un problème apparaît lorsque les savoirs établis sont tenus en échec (sinon il n'y a pas pb) ; ces savoirs devront donc, in fine, soit évoluer soit être remplacés.)

Les modalités de résolution de problème, dans la démarche scientifique sont très variées ; lorsque ces procédures intègrent le recours à l'expérimental, la démarche devient alors une "démarche expérimentale". Cette dernière est donc une sous catégorie de la démarche scientifique.

La démarche technologique est une démarche qui conduit, par résolution d'un problème technologique, à la construction d'un objet qui réponde à la commande. Cette construction étant, bien entendu, reproductible (d'où l'importance du cahier des charges en techno).

La démarche d'investigation est une démarche plus large d'exploration de son environnement. Elle intègre aussi bien la démarche scientifique au sens strict que la démarche d'appropriation du monde par la description (verbale, graphique ..), la construction d'un vocabulaire spécifique permettant des échanges, la classification des objets. Cette investigation étant orientée, bien entendu, par un questionnement préalable des enfants à propos du sujet étudié. Les différentes questions permettront de définir les procédures d'investigation : dois-je décrire, classer, expliquer, ou construire un objet ? Et comment vais-je m'y prendre pour atteindre ces objectifs ?

Voilà, j'ai essayé d'être synthétique, en espérant ne pas avoir été trop caricatural.
Bernard Darley

ven 25/06/2004 - 03:01
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Vous avez bien perçu le point central des nouvelles méthodes d'enseignement des sciences...
Cependant, souvenez-vous que, au début de l'enseignement des sciences à l'école, la « leçon de choses » était reine, et ce depuis les années Jules Ferry. Cette situation est alors remise en cause dans les années 1970. Conjointement avec la remise en cause des méthodes de l'enseignement des sciences expérimentales.
Dans la leçon de choses, la « posture pédagogique » de l'enseignant était celle d'un guide, d'un « maître » qui, en « montrant ce qu'il fallait voir » disait à l'élève ce qu'il devait retenir. Le savoir était transmis à un élève au cours d'une « leçon », où cet élève écoutait, notait, dessinait, observait, attentif à ce que le maître « lui disait de faire ». On parlait alors d'un élève attentif, passif, dont la seule action était d'appliquer les consignes du maître.

Selon les méthodes prônées actuellement, la visée est renversée : l'enfant est placé au cœur de l'apprentissage, ce qui veut dire que l'enfant (aidé de la classe et du maître) doit d'abord s'interroger, se poser des questions. Il revient au maître de permettre à cet enfant de rechercher ses propres réponses, ses propres solutions en agissant par lui-même, et non plus d'apprendre par cœur des « résultats » scientifiques (que l'on désignera par « apprendre la physique », « apprendre les sciences de la vie et de la terre ») élaborés par la communauté des chercheurs.

Pour mener ses recherches, différentes pratiques sont offertes en fonction des types de questions et du niveau de l'élève. On comprend qu'un enfant de cours élémentaire qui s'étonne que le niveau de l'eau de l'aquarium baisse au fil des jours, puisse seulement rechercher ce qui se passe et se satisfaire de constats expérimentaux (par exemple, couvrir le récipient avec un couvercle, laisser de l'eau dans un flacon ouvert « pour voir » ce qui se passe, rechercher si à chaque fois il se passe la même chose, etc.). Pour faire ses constats, il doit développer des observations en faisant varier les situations : de l'eau sur une assiette, de l'eau dans un bocal, de l'eau sur du tissu, etc. Il doit donc mener une « investigation » pour essayer de cerner ce qui ne change pas, afin d'expliquer le phénomène qu'il constate (et que, au final, le maître nommera «évaporation»). Cette investigation expérimentale a pour fonction de recenser le maximum de cas pour faire des comparaisons.

Plus tard, en cours moyen, l'enfant a conscience de son pouvoir d'action sur le monde qui l'entoure. Il peut, par exemple, vouloir accélérer l'évaporation (par exemple, pour retrouver le sel de l'eau de mer). Il doit donc rechercher les moyens d'accélérer le phénomène. Là encore, il va mener des expériences «pour voir» quels paramètres (ou facteurs) peuvent causer une augmentation de la vitesse d'évaporation : il va conduire une « investigation » en même temps que tous les groupes de sa classe et mettra en commun avec les autres les résultats obtenus.

L'investigation est donc l'étape d'une recherche qui se propose d'examiner les différents cas, les différentes façons, les différents facteurs, etc., qui interviennent au cours d'un phénomène encore inconnu de l'enfant.

Dans tous les cas, l'investigation menée par l'enfant demande du temps, qu'il convient de ne pas escamoter si l'on souhaite que l'enfant puisse bénéficier des acquis méthodologiques de ce travail. Le « tâtonnement expérimental » est l'un des piliers de l'investigation.
Dans le cas des exemples précités, cette investigation est de type expérimental car c'est par des manipulations concrètes que l'élève recherche des réponses.

« Démarche scientifique », « démarche expérimentale »
C'est une démarche de recherche de réponses ou de solutions dont le résultat est l'établissement de concepts, ou de relations entre concepts.
Par exemple, en cycle 2 les activités avec l'eau et divers objets vont permettre à l'enfant de construire le concept « flotte » ou « coule ». Puis en approfondissant (qu'est-ce qui flotte ? qu'est-ce qui coule?) l'enfant établira les relations entre la matière et le fait de couler ou pas. Il opérera des classements « pour mettre de l'ordre » et constater que, par exemple, le bois (celui usuel et non l'ébène) est une matière qui flotte toujours.

L'enfant met ainsi en œuvre des opérations intellectuelles logiques de comparaison, classement, comme exploitation d'observations ; il pratique le raisonnement au service de sa recherche. Il mène donc une recherche rationnelle, conduite logiquement.

Cette recherche peut s'effectuer à l'aide d'ouvrages, d'enquêtes, de recherches documentaires mais aussi d'activités expérimentales. Dans ce dernier cas, la « démarche scientifique » est dite « démarche expérimentale » puisqu'elle se mène à l'aide d'expériences.

Une démarche expérimentale pour établir une relation (qualitative) suit des étapes ordonnées comme suit :

- Un départ par questionnement

- Une première expérience « pour voir » et rechercher les facteurs

- Des hypothèses (suppositions seulement en cycle 2) sur le rôle des facteurs

- Des expériences test de validation de ces hypothèses

- Des résultats et leur interprétation

- Une ou des conclusions.

On voit bien que l'expérience « pour voir » est ici une investigation.
La démarche scientifique (ou expérimentale, si manipulations) s'inscrit dans un projet de « comprendre le monde ». C'est la démarche du scientifique qui cherche à expliquer le monde naturel.

« Démarche technologique »

Cette démarche se différencie de la démarche scientifique en ce que sa visée est surtout pratique : elle vise à trouver scientifiquement et logiquement une ou des solutions concrètes à un problème technique donné. Le résultat que constitue la solution se concrétise dans un objet technique final.
Par exemple, si l'étude des leviers est un problème d'équilibre, donc scientifique, dont un chercheur (Archimède, à l'époque) a établi la condition scientifique, l'étude du perfectionnement d'un levier donné afin d'obtenir de meilleures performances relève d'une étude technologique dont le terme sera «le meilleur levier» pour la période donnée (solidité, pas d'infléchissement, commodité d'usage, etc.)

Autre exemple, celui du bateau. Si la recherche des conditions de flottaison de la matière est une recherche scientifique (poussée d'Archimède), la recherche du bateau qui se maintient le mieux sur l'eau, se dirige en ligne droite sans dériver, relève plutôt d'une recherche technologique (vaut-il mieux une «coquille de noix» qu'une petite barque ?).

On peut dire que les sciences sont à la recherche des principes de fonctionnement, et que la recherche technologique vise, selon les conditions, à optimiser les performances d'un objet technique donné.

jeu 01/07/2004 - 03:01
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